lundi 1 février 2010

L'undergound...


J'ai lu récemment le livre «L'undergound musical en France» des auteurs Eric Deshayes et Dominique Grimaud. Ce livre tombait vraiment à point dans mes réflexions et mes recherches sur le sujet. Le premier chapitre nous explique comment les évènements de mai 68 sont venus façonner le paysage musical en France, en particulier dans l'underground. De plus, les auteurs utilisent une image très évocatrices en disant que l'underground a pris le maquis. Si la France s'est avérée une des perdantes de la deuxième guerre, en plus d'être collaboratrice, une fraction de ses citoyens ont empruntés le chemin de la résistance. J'imagine que la résistance en France est vue comme un acte héroïque, noble. Ainsi, ce n'est pas surprenant que cette voie, le maquis, soit envisagée par les musiciens qui souhaitent résister aux pressions des multinationales et des majors. Bref, encore du jus pour la réflexion...

Tout au long des pages de ce livre,on découvre des artistes fascinants, dont les ramifications semblent inépuisables, des musiciens s'organisant entre eux, prenant en main leur distribution, la vente de disque, les réseaux de tournées... C'est un bel exemple de mobilisation des artisans de l'underground. Exemple que devrait suivre le Québec. Cette mobilisation, cette action, permet que la scène muiscale se développe, amène un brassage d'idées, de collaborations et de développement très intéressant. Ici la scène semble un peu trop sclérosée. Les gens sont assis et attendent sagement que la subvention rentre. C'est un peu un symptôme du Québec en général, personne ne veut se mouiller, se démarquer, remettre en question certaines idéologies intouchables. Le problème est surement que l'underground n'est pas viable au Québec... En dehors de Montréal, peu d'opportunités de show ou de ventes pour des groupes expérimentaux qui oeuvrent en rupture avec la tradition. La seule façon de s'en tirer est d'être chansonnier et tourner le Québec en entier de tavernes en tavernes. C'est un peu triste. Je me répète, mais quand les québécois francophones vont finalement créer quelquechose, ce seront des immigrants de deuxième génération ou des gens multipliant les contacts avec la scène musicale anglophone...

D'autant plus qu'on est confronté à cette tendance de vouloir s'approprier absolument l'underground pour le mettre en lumière. Comme si l'underground devait être évacué du champ culturel. On ne parle plus d'underground, mais de la relève. L'underground c'est les groupes poches, qui ne ciblent pas le grand public. Cette éternelle relève est insidueuse... Michel, de l'Oblique, disait que c'était aberrant de considérer Monsieur Mono (Éric Goulet) comme un artiste de la relève , «Criss, y'étais dans Possession Simple tabarnak!». La petite controverse qui entoure les Francouvertes et Bernard Adamus, reflète ça un peu. Les Francouvertes, concours pour les artistes émergents, cherchent aussi à avoir du public, garantir des subventions et susciter des revenus. Avoir Bernard Adamus aux Francouvertes c'est bon pour la pub, ça va aussi attirer du monde.C'est embêtant aussi, s'il gagne on va crier à l'injustice et s'il ne se rend pas en finale on va questionner son art... La façon de procéder des Francouvertes semble être un peu questionnable, selon les termes, Pierre Lapointe pourrait partir un band avec Patrick Watson, Lapointe aux claviers, Watson aux drums, prendre une chanteuse inconnue, trouver un nom catchy et s'inscrire au concours comme un artiste de la relève.

Dans le milieu du rap en particulier, être underground c'est mal. Il faut absolument connaître du succès et dès qu'une initiative se fait remarquer ou attire du public, hop on la programme à un festival quelconque. C'est bien, même que l'entreprise est louable, mais les effets secondaires d'un tel procédé contribuent selon moi à clouer les artisans sur leur chaise, espèrant la reconnaissance immédiate.

Les exemples foisonnent, le slam en est un bon. Soirées qui existent depuis le milieu des années 90 dans la communauté anglophone montréalaise, il aura fallu que la France nous en propose une version musicale du slam avec Grand Corps Malade pour que les gens se réveillent et crient au génie. Depuis, les soirées abondent, programmation dans les festivals, production d'albums de divers artistes capitalisant sur le phénomène...Un autre exemple me vient des Word Up Battles. Joute de rap où deux rappeurs s'affrontent avec des textes préparés d'avance. Belle initiative, inspirée elle aussi de la scène anglophone (de Toronto cette fois-là , mais aussi des États-Unis). J'aime beaucoup écouter les capsules internets de ces rencontres où les rappeurs s'envoient allègrement chier en utilisant des insultes personnelles à l'individu, des propos sexistes, racistes, name it... Moi j'aime ça, je viens du rap, comprends les références et trouve ça drôle. Monsieur et madame tout le monde....pas sûr. C'est cool que ce soit programmé à l'Off Festival d'été de Québec...cool pour les initiateurs du projet, mais c'est quelquechose qui pourrait rester underground, qui n'a pas sa place dans un festival et qui ne s'adresse pas au grand public!

Dès qu'on parle de reconnaissance publique, on parle de nivellement vers le bas. Ce qui au départ sera un peu expérimental, se fera critiquer et les gens souhaiteront quelquechose plus à leur niveau (surtout pour les groupes d'expression francophones). La majorité des artistes embarquent dans ce mouvement sans même s'en rendre compte et édulcolorisent leur art afin de le rendre plus digestible ou mettent leurs énergies dans des projets avec lesquels ils pourront capitaliser. Et là je ne parle même pas des médias culturels... seul commentaire, je parlais récemment avec MGM (de feu Division Blindée)de son idée de créer un média culturel imprimé du type du magazine Actuel en France avec, entre autres, des entrevues de fond avec les artistes...à suivre.


Pour finir, je me permets de citer mon ami RU et sa chanson «Suck it» : «Moi je reste sous la terre, pis je me roule à terre, quand je regarde toi ce que t'as toute à faire.»

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