lundi 28 septembre 2009

Retour sur Mike Tamburo/Khôra/Ensemble Kesdjan à la Casa


Jadis, un certain Jimi Hendrix a posé cette question : «Are you experienced?». C'était en 1967.

On a tout suite conclu à une symphonie psychédélique, prônant l'usage de drogues hallucinogènes, invitant les auditeurs à sortir de leur corps et entendre ce qu'ils n'avaient jamais entendus. C'était bien sûr la mode de reprendre le discours de Timothy Leary, principal héraut de l'utilisation du LSD et des substances hallucinogènes. Dr.Leary a écrit des livres intéressants et enregistré des disques de spoken word médiocre. Euh...à vrai dire certains de ses livres sont aussi médiocres...Il m'est d'avis que Tim Leary est un usurpateur de conscience, prônant la paresse et l'hédonisme face à la souffrance volontaire et l'effort. À cet effet, j'aime beaucoup raconter l'histoire de Richard Alpert, aussi connu sous le nom de Ram Das. Professeur à l'université de Harvard avec Timothy Leary, lui aussi a contribué à propager la culture psychédélique. Cependant Alpert est allé tenté sa chance en Inde, distribuer l'éveil sous forme de microgrammes de LSD...Il a frappé un mur. Et ce mur ce nommait Neem Karoli Baba. La légende raconte de Karoli Baba aurait été intéressé par la substance d'Alpert et aurait pris toutes les doses que celui-ci avait sur lui, sans effet (visibles bien entendu). Le reste fait partie de l'histoire; Alpert se converti à l'hindouisme et change de nom pour Baba Ram Das, revient aux Etats-Unis et enseigne la méditation aux hippies.

Ceux qui me connaissent, connaissent mon intérêt pour Gurdjieff. Ils savent aussi que l'Ensemble Kesdjan est un véhicule musical me servant à explorer l'enseignement contenu dans le livre «Récits de Belzébuth à son petit-fils». J'ai pris part à des groupes Gurdjieff pendant près de quatre ans et ce fût la meilleure expérience de ma vie, je me rappelle de ces années comme des années empreintes d'une richesse émotionelle et intellectuelle sans précédent. Fruit d'un hasard particulier, l'enseignant du groupe auquel je m'étais joint avait été disciple de Karoli Baba en Inde avant de rejoindre Sherborne House, l'école de J.G. Bennett en Angleterre...

Donc, samedi le 26 septembre avait lieu la réunion de Mike Tamburo et de l'Ensemble Kesdjan à l'intérieur d'une Casa del Popolo légale. Je dois mentionner que ma relation avec la Casa est particulière car j'y suis vu un peu comme un promoteur, ce que je ne suis vraiment pas, ou du moins, je suis un mauvais promoteur... Ainsi, la Casa m'avait suggéré de rejouter sur le bill un gars de Toronto nommé Khôra, suggestion des gens du label Constellation. Je ne suis pas du genre à refuser, donc j'ai accepté en sachant que l'album de Khôra avait pas mal de airplay sur les ondes de CKUT. J'ai écouté quelques extraits sur internet et n'avait pas vraiment accroché, j'attends d'écouter le disque avant d'en parler ici. Sauf que je me souviens que ça ne ressemblait pas au set qu'il nous a servi samedi. Un set ordinaire, pas mauvais très fort (au niveau du son) et visiblement un sous-produit de Godspeed...Je ne sais pas si le gars de Constellation qui était là a apprécié...

Je ne m'attarderais pas sur le set de l'Ensemble Kesdjan, c'était un des bons shows qu'on a fait, assez tight pour de l'impro. C'est le set de Mike Tamburo qu'il faut souligner. Ce gars est tout simplement génial. Fallait le voir avec sa barbe, ses cheveux longs, son t-shirt des Beatles et ses lunettes d'ondes (?)durant le show de Khôra, c'était surréel. Son set à lui me ramène à l'idée de départ de cette entrée :« Are you experienced?» Ceux qui ont assisté à ce show l'ont été. Transportés on ne sait où par les sons émanant du hammered dulcimer, pour en revenir vidé mais apaisé, envahi par un calme méditatif serein. Mike a joué deux pièces, la première pour rééquilibrer les énergies de sa ville (Pittsburgh) envahie par une délégation du G20. Il joué cette pièce sur un instrument de sa fabrication le «Crowned Eternal», un instrument à cordes tellement particulier, qui peut produire un drone comme une tambura mais tellement metallique, oscillant entre des cris de crapauds et des rayons laser, ponctués de notes jouées ajoutant une touche mélodique remarquable à l'ensemble. Et la deuxième au hammered dulcimer, pièce qui se retrouve dans son nouveau coffret «The tenth gate and other revelations», coffret de six cd-r, fait à la main.

J'ai parlé de l'autre coffret fait par Mike déjà. celui-ci est meilleur...franchement, d'une beauté incroyable tant au plan visuel que sonore. Chaque disque a sa pochette et son artwork propre ainsi que sa petite histoire l'accompagnant. En cette ère de fichiers téléchargeables, je ne le répèterais pas assez souvent , il faut investir dans le visuel et l'objet si on veut sortir de quoi. Sinon, mettez-le en download gratuit sur le web...

Une très belle soirée...

D'ailleurs pour ceux que ça intéresse, la semaine prochaine sortira le disque du Electric Kesdjan Unit, une collaboration entre l'Esemble Kesdjan et Mike Tamburo, enregistrée l'année dernière. Complètement instrumental, pas de paroles, beaucoup de synthés. 25 copies pour commencer avec un artwork exclusif de Jacinthe Loranger...

En passant mercredi 30 septembre: http://www.gurdjieffmontreal.com/

samedi 19 septembre 2009

Selda Bagçan


Il y a quelques temps déjà, le beatmaker californien OhNo (frère de Madlib) sortait l'album instrumental «Dr.No's Oxperiment» sur le label Stones Throw. Un album solide, composé d'échantillons provenant de musique turque, libanaise, grecque, etc...Deux tracks se démarquaient vraiment de cet album soit «Heavy» et «Exp out the Ox»; des grooves entraînants, une teinte d'orientalisme, de bons ingrédients...

Plus tard, j'ai été amené à découvrir la musique du label Finders Keepers , oeuvre dévouée de deux dj's qui s'efforcent à rééditer des albums obscurs d'à travers le monde, avec comme prérequis la présence de breaks sublime (pour une part, il y a aussi de la musique de Welsh...). J'avais remarqué certains albums de ce label au Cheap Thrills , en particulier ceux portant la mention «Anatolian invasion», de la musique turque complètement éclatée, enregistrée dans les années 70. La Turquie a toujours été à mi-chemin entre l'Orient et l'Occident et ces deux contrastes culturels ont souvent menés à des chocs plus ou moins importants. Musicalement, dans les années 70, les turques commençaient à expérimenter avec la musique, utilisant les possibilités offertes en studio par les nouvelles technologies, tout en conservant une teinte résolument locale dans leurs oeuvres. Les premiers albums de Selda Bagcan et d'Ersen sont dans cette catégorie. Des synthétiseurs pétés, des saz amplifiés, de la distorsion, un mélange de breaks de funk...bref assez «Out there»! Quand j'ai écouté le disque de Selda sur Finders Keepers, je ne savais pas à quoi m'attendre. De la démence totale...et drôlement, une familiarité avec certains breaks, soit ceux se retrouvant sur l'album de Oh No, cité plus haut...À chaque fois que je reconnais un break échantillonnée, je ne peux m'empêcher de souligner au passage la paresse du beatmaker... Quand tu ne fais que sampler un break, rajouter un drum et looper le tout...me semble que ça manque de créativité...Et hop, il ne m'en fallu pas beaucoup plus pour reléguer Oh No au rang des beatmakers de base...et perdre un peu intérêt dans ses sorties, tant pis.

Quelle ne fût pas ma surprise cependant d'entendre sur le nouvel album de Mos Def «The Ecstatic» le track «Supermagic»... sur le beat de Oh No «Heavy» paru des années auparavant sur , encore une fois, l'album cité précédemment...Je ne sais pas c'est la faute de qui, surement que Mos Def trippait au boutte sur ce track et voulait absolument l'utiliser pour son album...mais ça fait un peu réchauffé, pas mal même. J'avais eu la même impression avec l'album de MF Doom «MM Food», album sur lequel Metal Face nous resservait des beats déjà utilisé...disons qu'en tant qu'amateur, ça laisse froid...Rapper sur un beat sorti 2-3 ans avant et qui a connu une certaine diffusion, n'est pas le move le plus créatif qui soit.

Bon, eh ben, ne reste qu'à retourner à la version originale, nettement supérieure, surtout grâce à l'émotion véhiculée par cette chanteuse hors du commun qu'il fait du bien de découvrir 30 ans plus tard.

mardi 15 septembre 2009

Comus: First Utterance


Ma recherche musicale est à l'image de ma recherche amoureuse...j'en suis de plus en plus convaincu.

Je ne sais pas ce que je recherche exactement dans la musique, mais quand je le trouve je le sais. Il me suffit d'écouter les premières minutes d'un album pour savoir si celui-ci me plaira ou non. Certains ne me plaisent pas sur le coup et c'est en apprenant à les connaître que je m'y intéresse un peu plus; lire une critique, une entrevue avec l'artiste, comprendre l'intention derrière la musique...C'est sûr que l'excitation occupe le premier plan, si la musique ne m'excite pas ou ne suscite pas en moi l'émotion voulue (ou souhaitée) je la délaisse rapidement....comme mes relations amoureuses... Je n'ai évidemment pas encore trouvé le disque que je pourrais écouter encore et encore sans me lasser. À ce niveau ce serait difficile, j'aime tellement de genres différents que je ne peux pas me contenter d'une seul disque. Parfois j'ai envie d'écouter du rap, d'autres fois du folk, des choses plus heavy...tout varie selon l'humeur du moment ou l'énergie qui y est associée.

Je cherche cependant la perle....cette perle indémodable vers qui je pourrais revenir continuellement à chaque jour. Il y en a eu plusieurs de ces perles, dans la musique je parle, chaque époque à son lot de disques qui traversent les âges sous des amas de poussières pour être redécouverts par la suite. J'adore ces disques...ceux qui ont été négligé à l'époque de leur sortie, jugés invendables par leur labels, relégués aux oubliettes entre la première et la deuxième sortie... jusqu'à ce que quelqu'un d'une autre époque en fasse l'éloge, le recherche activement et met son énergie dans la rediffusion de cette oeuvre oubliée. Un des disques qui m'a le plus marqué est celui de Simon Finn : «Pass the distance». Canadien émigré en Angleterre pour faire de la musique, celui-ci enregistre un disque et disparaît dans les brumes. Jusqu'à ce que David Tibet (de Current 93) le retrouve à Montréal et le convainc de rééditer cet album sur son label. Redonnant goût à Simon Finn par le fait même de faire de la musique et d'enregistrer deux autres disques par la suite.

Récemment, c'est le groupe britannique Comus (site ) qui a refait surface. Ceux-ci ont sorti en 1971 l'album «First Utterance» qui eut l'effet d'un ovni dans la scène musicale de l'époque. Un espèce d'album folk rock, tirant sur le prog , avec des voix torturées et des arrangements surprenants. De plus, le thème des paroles (et du groupe) est inspiré du personnage de Comus, issu d'un poème de John Milton écrit en 1634, meurtrier et violeur du moyen-âge qui s'attaque à une jeune fille sans défense perdue en forêt...Disons qu'on s'éloigne des valeurs hippies prédominantes à l'époque...et ce choix a éét fait consciemment par le groupe. «First Utterance» est un album particulier, je le qualifierais d'emblée de malade mais c'est trop général...On ne peut retenir un effet de surprise en écoutant ce disque, tant au niveau des parole, que du break de bongos dans la toune «Diana», que du refrain de «Drip Drip», des harmonies vocales angéliques et démoniaques, des passes de guitatre 12 cordes, de slide....Normal que ce soit le groupe métal Opeth qui les a sorti de leur retraite pour un spectacle. Un spectacle, parfois c'est tout ce qui est nécessaire pour donner le goût à un groupe de se reformer, de faire d'autres shows et d'enregistrer là où ils s'étaient laissés. C'est sûr qu'après près de 40 ans on ne peut s'attendre à la même chose, mais quand même, Simon Finn s'en est plutôt bien sorti, alors pourquoi pas eux....

Comus est ce genre de perle, dont on n'est pas sûr d'aimer au début mais qui nous surprend à chaque écoute et qu'on trouve tellement spéciale qu'on ne peut finalement pas résister à son charme. Mais l'effet durera combien de temps ...

En passant, samedi le 19 septembre, Simon Finn se produira à la Casa del Popolo, avec en première partie le merveilleux projet solo d'Éric Gingras (contrebassiste avec Héliodrome et l'Ensemble Kesdjan) Enfant Magique.

dimanche 13 septembre 2009

Nestor Wynrush: Trinnipeg! 78


Un peu de rap canadien pour les amateurs. Jamais entendu parler de Nestor Wynrush...à juste titre puisque celui-ci émerge de la scène hip-hop des provinces des prairies canadiennes. Il y a effectivement une scène hip-hop dans cette région isolée du monde qui n'attire le regard de personne, ou presque. Les prairies sont un peu le vilain petit canard du hip-hop canadien. Les provinces des maritimes nous ont donné Buck 65, Sixtoo, Scratch Bastid, Classified, Josh Martinez... L'Ontario , c'est le côté plus pop de la chose avec les Kardinal Offishal, Choclair,K-Os etc...mais aussi Noah23, 4th Pyramid...et la côte ouest c'est Rascalz, Moka Only et Swollen Members, Birdapres...C'est fou à quel point j'ai aimé le premier disque de Swollen Members en passant...«Balance» reste pour moi un classique du hip-hop canadien.

Maintenant, l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba ne semblent pas fournir de hip-hop de qualité. S'il y en a , et bien il doit exister une sorte de barrière métaphysique qui l'empêche de traverser l'Ontario et de se rendre au Québec...Pour ma part, j'ai franchit cette barrière grâce à un site internet français nommé hiphopcore. En découvrant ce site dédié au rap alternatif il y a quelques années, j'y ai trouvé une référence en matière de hip-hop et surtout dans un genre de hip-hop qui me plaît. Je n'ai jamais été déçu des critiques provenant de ce site et les disques encensés par leurs collaborateurs ont une place de choix dans ma collection. Un bon jour de navigation sur les internets, je suis tombé sur la critique du disque d'un artiste nommé Soso. Artiste hip-hop canadien provenant de la Saskatchewan(!). La critique élogieuse m'a poussé à suivre le lien vers la boutique en ligne Phonographique où je me suis procuré le dit disque ainsi que d'autres trucs obscurs dont je n'avais jamais entendu parler dont le groupe Dead can't bounce. Quand j'ai reçu le paquet j'ai attendu le lendemain avant d'écouter le disque de Soso «Clarence and tenth street»...silence...émotion incontrôlable...C'était un matin d'automne, je quittais l'appartement de ma copine de l'époque pour aller travailler. Je roulais en bicyclette sur Rosemont et j'ai vécu un des plus beau moments de ma vie...Dès la première pièce j'ai senti que j'avais dans mon discman un chef d'oeuvre, un album d'une puissance émotionelle incomparable. L'intro du vol d'outardes, l'entrée du beat, le soleil qui se lève, le boulevard Rosemont, la côte Pie-IX, les paroles semi-rappées, les thèmes super intimes...quel matin. c'est con me direz-vous de considérer une des plus belles journées de sa vie en fonction d'un disque, mais c'est pour dire à quel point la musique occupe une place importante chez moi...Par la suite, j'ai acheté d'autres disques de Soso, tous aussi bons et j'ai même partagé la scène avec lui lors du showcase du label Endemik au Pop Montreal en 2007, avant de sortir moi-même un disque sur ce même label...

Par la suite j'ai aussi appris que la boutique Phonographique appartenait à Soso ainsi que le label Clotheshorse records, qui y est rattaché. J'en ai fait une autre source d'achat mais en matière de hip-hop canadien, et surtout des prairies. Bon, dire qu'il n'y avait rien avant cela est un peu mentir. J'avais entendu parler du label Peanuts & Corn, de Pip Skid et McEnroe mais je n'ai jamais accroché sur leur musique... Phonographique m'a permis de découvrir autre chose. Ça et la venue d'Ira Lee à Montréal. Ira est lui-même issu des prairies, il faisait partie du groupe Dead can't bounce dont je me suis procuré l'album mais qui a été éclipsé par celui de Soso....(sorry Ira). Voilà donc qu'en plus de Soso je découvre aussi Ira Lee, Epic et Kay the Aquanaut. Une scène alternative de haut niveau qui semble trouner plus en Europe qu'au Canada...(quoi de neuf...).

Sorti récemment sur Phonographique, l'album de Nestor Wynrush est, disons, moins alternatif que les autres. Beaucoup plus orthodoxe dans son approche, ses thèmes, la production et le flow, «Trinnipeg!78» est tout de même un excellent disque touchant beaucoup à l'immigration des parents d'un jeune Trinidadien et de l'adaptation au territoire plat du Manitoba...C'est un MC lucide, intelligent, capable de se positionner dans un Canada ouvert à l'immigration, sans tomber nécessairement dans des histoires de rascisme et de discrimination. Bien sûr il en parle, mais le contenu ne repose pas que la-dessus. Il y a de l'humour, de l'introspection et aussi des émotions (primordial pour moi). La production est assurée par plusieurs beatmakers, mais on retiendra la présence McEnroe et de Soso.

Le Hip-Hop canadien n'est pas mort, il a été cryogénisé dans les prairies (et dans les maritimes) et le réchauffement de la planète est en train de le dégeler tranquillement...

jeudi 3 septembre 2009

Ceux qui marchent seuls




J'ai découvert la musique de Leonard Cohen d'une drôle de façon. Lors de la sortie du film à son sujet (I'm your man), on m'avait suggéré de le regarder en précisant que je devrais trouver ça intéressant. C'est ce que je fis quelques semaines plus tard et j'ai trouvé ce film vraiment ennuyant...Un peu plus d'un an plus tard, je me morfondais chez moi, admirant les dégâts de ma dernière relation amoureuse, quand un film à la télévision attira mon attention. C'était le film «My favorite game», basé sur le livre du même titre de Cohen, ce livre étant une fiction auto-biographique basée sur la vie de l'auteur. Durant tout le film je n'ai pu me résigner à diminuer mon degré d'attention, captivé totalement par les dialogues, la musique et ce que vivait le personnage principal. Pas juste captivé, je me suis identifié d'une façon quasi-pathologique au personnage principal et aux aux paroles des chansons, que j'en pleurais à la fin. Mais une belle tristesse m'habitait, ce genre de tristesse qui nous habite quand on voit clairement comment on agit et qu'on se rend compte qu'on est pas seul à vivre ces situations.

Précisons que ce n'est pas un grand film; le jeu des acteurs n'est pas super, la direction photo non plus...mais quand même. À la fin du film, j'ignorais complètement ce que je venais de voir...j'ai donc regardé attentivement le générique de la fin, apprenant que c'était basé sur un livre de Leonard Cohen et que c'était sa musique qui accompagnait les images...Le lendemain je suis allé acheter les trois premiers albums de Leonard Cohen, venant d'être réédités à ce moment en une version deluxe, très belle. Je me suis immergé dans sa musique, dans ses textes et j'ai découvert un genre d'âme soeur. J'ai la conviction que cet homme a lutté, et lutte surement encore, avec des démons similaires aux miens, teintés de femmes, d'amour et de quête spirituelle.

Rapidement j'ai tenté de faire des liens, des corrélations entre mes mouvements créatifs et ceux de M. Cohen. Plusieurs lectures m'ont amené à redéfinir, ou a préciser ma perception de l'art et des artistes. Un livre en particulier m'a lancé sur une piste enrichissante, un livre du psychanalyste Jean-Michel Quinodoz traitant des rêves. Effectivement, mes textes les plus récents traitent beaucoup d'images et d'idées que j'ai eu en rêve et qui m'ont poussé à agir dans certaines directions. Cet auteur mentionne que l'art, comme le rêve, a une fonction de réparation symbolique. Que l'artiste (véritable, selon l'auteur) , quand il est au prise avec une position dépressive avec le vécu d'être séparé et seul et avec la perception de la différenciation et de la perte, met en jeu cette fonction de réparation. L'inconscient est impliqué dans la recherche d'une solution à un conflit.

Ce qui m'emmène à parler de deux sources de création, soit la personnalité (conscient) et l'essence (l'inconscient). Trop d'artistes actuels créent à partir de leur personnalité et ne donne rien de bon, du moins selon mes goûts personnels. Ceux qui prennent leur source dans leur inconscient sont minoritaires et font généralement des oeuvres qui durent dans le temps, car ils touchent à des thèmes universels. Ok, pas l'amour, les relations hommes-femmes, où autres thèmes pouvant être exploités facilement par la personnalité, mais des thèmes accessibles seulement à ceux qui cherchent des solutions et qui ont cette capacité à baigner entre deux mondes, soit celui du rêve et de la réalité. Et dans ce registre, le travail des femmes est vraiment différent de celui des hommes; où les conflits et les solutions diffèrent dans leurs façons d'être abordés et vécus, et c'est normal. Pas de sexisme la-dedans, on a même pas les mêmes organes à l'intérieur de notre corp, c'est normal que l'intimité de l'être soit aussi un peu différent, du moins dans sa façon d'accéder au conscient...C'est surement pour ça que je «résonne» plus avec l'art masculin.

Voilà donc que cette semaine, je me suis procuré la sortie 28 sur le sublime label Numero Group, intitulé: «Wayfaring Strangers: Lonesome Heroes», faisant un peu suite à la sortie 18 «Wayfaring Strangers: Guitar Soli». Je suis incapable d'arrêter d'écouter ce disque depuis dimanche...Quelle belle compilation. 17 tracks de chanteurs folk obscurs, n'ayant jamais connu de succès commercial, 17 tracks différentes, d'artistes différents, qui pourtant présente une étonnante homogéinité. Ce sont les chansons qui ont été choisies pour cette compilation et non nécessairement les artistes et ces chansons traitent presque tous de l'amour, de la perte, de la recherche du père, la solitude....Ces pièces sont aussi presque toutes tirées de la même époque, soit la fin des années 60 et 70. Les États-Unis sont en plein Vietnam, plusieurs des artistes sur cette compile y sont allés, ont perdus des amis, de la famille, leur santé mentale...D'autres échappent au tirage mais sont affectés quand même par la situation...Mais tous partagent une émotion indéfinissable, un mood de solitude et d'errance se rapprochant beaucoup de Leonard Cohen. D'ailleurs, la pièce de Jay Bolotin «Dear Father» (superbe) fait penser à l'oeuvre de Cohen, dans son style et dans le thème, mais selon les liners notes, c'est plus le fruit d'un hasard. Tous aussi ne connaîtront pas de succès, devront jongler avec un travail à temps plein et leur musique, ou sinon se contenter de peu...il y a quelquechose de révélateur là-dedans, j'ai toujours dit que les meilleurs albums étaient les premiers, à moins de continuer à vivre du «struggle»...

Voilà un disque qui m'inspire à écrire, ça faisait longtemps que j'étais pas tombé sur une perle de ce genre...

Merci

mardi 1 septembre 2009

Time-Lag Records


«a gap or delay between one event and a related event that happens after it»

Dans ma série petit labels obscurs, je ne pouvais passer sous silence le travail acharné de Nemo, l'homme derrière Time-Lag records.

Basé aux États-Unis (Maine plus précisément), Time-Lag est aussi un magasin de disque et un espace de diffusion artistique. Mais c'est le label qui mérite mes louanges. Depuis sa création, cette étiquette cumule les parutions intéressantes en baignant ses pieds dans l'océan du folk expérimental, bien assis sur le quai. Car malgré une ligne directrice intransigeante, Nemo s'intéresse aussi à d'autres genres, plus accessibles ou moins...

Comme mentionné auparavant sur ce blogue, l'esthétique de la pochette joue un rôle majeur dans ma compulsion mélomaniaque et ici, pas de déception. La quasi majorité des sorties de Time-Lag sont des mini pochettes de vinyles, en carton super épais, le cd glissé dans une pochette de cotton. Les rééditions sont fidèles aux originales et les nouveautés impressionnantes.

Parceque Time-Lag s'intéresse beaucoup à la réédition de trucs obscurs, d'un peu partout. Ils ont commencé une série de rééditions de musique psychédélique brésilienne en ressortant les albums de Satwa, Marconi Notaro et Lula Cortes. Plusieurs sorties sont uniquement en vinyles aussi, avis aux amateurs (et c'est de la qualité, pas de vinyles cheap!). Un des disques les plus déstabilisants est celui des Patron Saints «Fohhoh Bohob», j'ai eu un peu de difficulté à m'adapter à ce disque mais finalement l'écoute est enrichissante.

Dans les artistes contemporains, la liste est longue: Ilyas Ahmed «Vertigo of dawn», disque sublime de psychédélisme intense, de la guitare à profusion mais toujorus bien dosées, des ambiance surréalistes digne des meilleurs rêves...GHQ «Cosmology of eye», le disque qui m'a fait aimé un peu le noise, suffisamment mélodique pour plaire aux plus réticents, les mélodies accoustiques se perdant dans des effets électroniques nous entraînant encore dans une rêverie hypersexualisée... MV & EE with the Bummer Road «Mother of thousands» , un des meilleurs disques que j'ai écouté ces dernières années, sublime disque double qui redéfinit le folk psychédélique moderne...Mais il y a aussi : Woods Family Creeps, Elephant Micah, Kuupuu...

Ça vaut la peine d'encourager. Commandez directement sur son site, c'est pas cher, le shipping très raisonnable et vous avez de la musique de qualité.