mardi 26 juillet 2011

Épiphanie musicale 1: Die Like a Dog


Il y a des expériences musicales qui changent nos vies. Je l'ai écrit suffisamment sur ce blog mais je tenais à revenir sur une expérience particulière qui a transformé ma façon de voir la musique.

En octobre 2000, j'ai décidé d'arrêter de consommer toutes formes de drogues et à partir de ce moment, sans m'en apercevoir, j'ai commencé à remplacé le manque par autre chose. À l'époque je travaillais dans un magasin de meubles au coin des rues St-Denis et Marianne à Montréal. Un emploi pas très très compliqué ou je devais m'occuper de l'entrepôt et de l'emballage des meubles. J'avais par ailleurs beaucoup de temps pour moi, pour lire et écrire. Je commençais à m'intéresser au jazz et plus particulièrement au free-jazz et/ou expérimental. Sous l'impulsion du beatmaker d'Atach Tatuq 1-2 d'Piq, je découvrais un paquet d'artistes et des formes musicale dont j'avais aucune connaissance. Par un heureux hasard,un après-midi, je suis entré au magasin de disque l'Oblique, situé à un coin de rue de mon travail. Et j'ai commencé à acheter des disques. Plein de disques.

Je ne me souviens plus du premier disque que j'ai acheté là-bas, seulement que c'était un genre d'électro drum & bass qui se voulait expérimental. Un artiste local. Je me souviens par contre que je suis allé le retourner et qu'à partir de ce moment je n'allais pas être dans les bonnes grâces du disquaire. Mais j'ai fait à ma tête. J'ai acheté beaucoup d'albums, surtout sur le label Tzadik. Des albums que j'ai revendus pour la plupart mais quand même intéressants. J'ai découvert Derek Bailey, Fred Frith, John Zorn bien sûr, Masada, Ikue Mori, Otomo Yoshihide et bien d'autres... Par la bande j'ai aussi découvert le label Ambiances Magnétiques, Shalabi Effect, Godspeed You Black Emperor....

Précisons qu'avant 2000, je n'écoutais que du rap. De 95 à 2000 je suis passé de uniquement du rap américain, à uniquement du rap français, à uniquement du rap québecois, à uniquement du rap américain. Vers la fin de 2000 je m'ouvrais au jazz, au dub, à l'électro...

Je continuais d'écrire des textes de rap mais me dissociait de plus en plus du mouvement et de la direction artistique de mon groupe Traumaturges. Parallèlement, je pratiquais la méditation de façon quotidienne, me plongeait dans les écrits bouddhistes et autres doctrines ésotériques orientales. C'est avec toutes ces considérations en tête qu'une petite entrevue dans le journal hebdomadaire Ici (R.I.P.) a capté mon attention en avril 2001. Une entrevue d'un quart de page qui annonçait un concert du saxophoniste allemand Peter Brotzmann. Le concert avait lieu à la Casa Del Popolo, endroit dont je n'avais jamais entendu parler à cette époque. Je connaissais un peu la musique de Brotzmann, surtout par ses collaborations avec Bill http://www.blogger.com/img/blank.gifLaswell telles Last Exit et Low Life. J'ai réussi à convaincre un ami rappeur de Traumaturges (Égypto Boz) de m'accompagner pour ce concert, hésitant un peu à m'y rendre seul.

Je n'aurais jamais pu prévoir l'impact que ce concert a eu dans ma vie. Dans une Casa del Popolo pleine à craquer, j'ai assisté à une performance du Die Like Dog Trio, soit : Peter Brotzmann au saxophone tenor, tarogato et clarinette, William Parker à la contrebasse et Hamid Drake au drums. J'ignorais tout de ces trois musiciens, ignorais surtout que les deux autres (Parker et Drake) étaient des maîtres dans leur art. Je savais que les trois improvisaient mais ne savait pas qu'on pouvait improviser de cette façon: que c'était possible d'être libre et de communier avec le public, de par la musique procéder à une expérience mystique transcendant la dyade public-musiciens. Quelque chose de nouveau se créait, une troisième force conciliatrice permettait à l'évènement qui était en train de se produire de passer à un autre niveau. Un niveau où l'écoute est totale; nous permettant de faire un avec la musique et les musiciens. Je n'ai jamais éprouvé une telle expérience par la suite. À ce moment j'ai compris que je pouvais être libre, rien de moins.

Évidemment, par la suite j'ai recherché les enregistrements de ces musiciens. J'ai découvert le Die Like a Dog Quartet, avec le trompettiste japonais Toshinori Kondo,l'album de Parker et Drake en duo ainsi qu'une pléthore de jazzmen remarquables tels;Alan Silva, Albert Ayler, Kidd Jordan, Jemeel Moondoc, Sunny Murray, Sabir Mateen, Joe McPhee... J'étais lancé et rien ne pouvait m'arrêter à ce moment.

J'ai surtout découvert le fabuleux label Eremite, qui a sorti le concert du 10 avril 2001 cd double. Brotzmann/Parker/Drake: "Never Too Late But Always Too Early" dedicated to Peter Kowald, contrebassiste décédé l'année de la parution du disque, soit 2002.

Plus tard, j'ai vu des photos de ce concert affichées à l'Oblique. Prise par un certain Jocelyn Boulais. J'ai hésité longuement pour en acheter une mais ne l'ai pas fait et finalement elles ont été retirées du mur. Quand j'ai fait la connaissance de Jocelyn via Michel à l'Oblique (5 ans plus tard), je lui ai demandé s'il avait encore les photos, il m'a répondu que oui et m'en a offerte une pour ma fête. Un geste que j'apprécie encore grandement aujourd'hui.

1 commentaire:

  1. Fort intéressant!

    J'ai hâte de connaître la suite (comme la toune de TSPC...)

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